Est-ce possible d’accoucher sans souffrir ?
La gestion de la douleur et des contractions pendant l’accouchement est un sujet incontournable pour toute femme enceinte. Profitons-en ici pour faire le point et chercher des pistes de réflexions/solutions.
Vous êtes enceinte et vous commencez à penser à votre accouchement. La question de la gestion de la douleur va, à un moment ou à un autre, traverser votre esprit. Et très souvent (même si je vous souhaite de tout coeur le contraire) accompagnée de ces questions :
– est-ce que je vais y arriver ?
– comment je vais gérer les contractions ?
– qu’est-ce que je fais si c’est « trop » ?
– est-ce que je suis obligée de prendre la péri si je ne souhaite pas souffrir ?
Ces questions sont parfaitement légitimes et méritent d’être abordées dans le détail. S’il y a une peur, une appréhension voire une angoisse, c’est qu’il y a matière à explorer, comprendre, ressentir, libérer.
Alors allons-y !
Préambule
En premier lieu, rappelons que la douleur n’est pas la souffrance, et inversement. La douleur est physique, la souffrance est mentale. On peut avoir objectivement mal alors que la souffrance, elle, est subie. On pourrait même dire que ce sentiment de perte de contrôle exacerbe la douleur réelle, physique.
La souffrance est nourrie par la peur. La peur de mourir, de ne plus contrôler, de ne pas être assez X-Y-Z etc. Et travailler sur la gestion de la douleur passe, selon moi, nécessairement par le travail sur ses peurs. Je ne peux que vous encourager à cheminer en ce sens tellement cela peut être transformateur et libérateur, pour votre accouchement bien sûr, et bien au-delà.
De la douleur des contractions
La douleur au cours de l’accouchement peut -être liée aux contractions elles-mêmes (contraction du muscle utérin, extrêmement puissant). Ou elle peut intervenir dans des zones annexes : dans le dos, sur la symphyse pubienne… sous l’effet de la pression du foetus sur les différentes structures du corps de sa mère.
La douleur de l’accouchement est physiologique
Ce qu’il faut bien comprendre, comme le rappelle Gisèle Piroit, sage-femme en maison de naissance à Bourgoin-Jallieu : « accoucher, ce n’est pas se faire arracher une dent. C’est une douleur normale, physiologique. Des endorphines sont sécrétées par le corps de la femme. C’est supportable si on les soutient ». En effet, accoucher n’est pas une rage de dents. C’est un processus intense pour le corps certes, inhabituel ok mais parfaitement naturel. Si vous prenez deux minutes de recul sur la vie et la nature humaine, il est facile de comprendre que Dame Nature a forcément anticipé la survie de notre espèce. Si la douleur était réellement insurmontable et insupportable pour la femme, il y a belle lurette que l’homo sapiens aurait quitté la scène du vivant.
Par conséquent, si on connaît et comprend comment fonctionne le corps au cours d’une naissance physiologique, on sait qu’il a tout prévu pour accompagner cette douleur (hormones, endorphines, mouvement, état de conscience modifié, etc.). Après il est tout à fait normal de ressentir le besoin d’être soutenue et accompagnée dans ces moments de grande intensité. C’est même grandement (et scientifiquement) recommandé mais j’y reviens plus tard.
Donc je vous l’accorde, accoucher n’est pas confort, non. Mais être parent ne le sera pas plus ! Autant vous y préparer dès maintenant.
Vous vivez une expérience intensément transformatrice, dans votre corps et dans votre coeur.
D’un point de vue philosophique, je me dis souvent que cette épreuve physique (oui c’est sportif) participe certainement à l’infinie valeur que nous donnons à la vie de nos enfants. Alors quand vous pensez douleur, dites-vous bien que cette intensité n’est jamais vaine. Vous êtes en train de donner la vie à votre enfant. Et ça, ça n’a pas de prix.
La douleur est physique, la souffrance est mentale.
Les 4 caractéristiques de cette douleur
Si votre mental est toujours en mode panique, vous pouvez prendre quelques instants pour lui expliquer que, lors d’un accouchement, la douleur est :
- intermittente (vous avez de looooongues pauses entre chaque contraction pour récupérer)
- évolutive (votre corps y va crescendo avec l’intensité, même si c’est un accouchement express)
- passagère (votre bébé ne mettra pas 8 jours à sortir, c’est promis)
- votre meilleur guide (si vous avez mal dans une position, c’est qu’il est surement temps d’en changer)
Dans mes accompagnements, j’évoque souvent le rapport, très personnel, que chacune entretient avec la douleur : des souvenirs, des expériences passées ou des épreuves physiques/sportives. Des expériences de vie au cours desquelles elles ont expérimenté voire dépassé une forme de douleur. Ensuite l’idée est d’aller lâcher, en conscience, ce qui a besoin de l’être. Alors il est possible de nourrir le coeur de cette confiance en votre corps et vos capacités. Yes, you can !
Gérer ou supprimer la douleur ?
Accompagner, soulager, cheminer avec ou gérer la douleur est très différent de la supprimer, la stopper, l’arrêter.
L’approche habituelle en médecine occidentale sera plus facilement de supprimer la douleur, de quelque nature que ce soit. La formation des soignants, les études et mesures auprès des patients vont en ce sens : échelle de la douleur, prise en charge de la douleur, etc.
Schéma classique : vous avez mal, on vous donne un antalgique/analgésique, ça va mieux, fin du problème.
Est-ce que ça fonctionne ? oui.
Est-ce que cela règle votre problème ? à vous de décider.
Je pense qu’une des principales raisons qui pousse les femmes à choisir la péridurale est le manque de préparation, de ressources et de confiance en leurs propres capacités à danser avec la douleur. Aujourd’hui les études* mettent en lumière que les femmes qui ont recours à un analgésique pharmaceutique ont globalement une moins bonne perception de leur accouchement que celles qui ont utilisé d’autres ressources pour gérer la douleur des contractions.Il n’y a pas de jugement ici. C’est une observation objective #EBP
Et encore une fois : votre corps, votre choix.
Faites ce que vous ressentez comme juste pour vous et autorisez-vous à changer d’avis aussi souvent que vous le souhaitez. C’est vraiment OK ! Le plus important restant votre vécu.
Quelles ressources pour gérer la douleur ?
J’entends ici quelles ressources non médicamenteuses peuvent être utilisées pour accompagner l’intensité des contractions ?
Une méta-analyse* sur plus de 30 ans de recherches et d’observations montre que le recours à diverses pratiques est plus bénéfique qu’une seule ressource isolée.
N’hésitez donc pas à faire votre « marché » et essayer diverses approches pour définir celles qui vous conviennent et vous soulagent le plus efficacement.
Ici le top 3 « officiel » :
* le soutien continu à la mère
Indispensable numéro 1, il est clairement mis en avant que c’est le soutien continu et renouvelé à la mère qui a le plus d’effet positif sur l’accouchement :
- moins de recours à la péridurale
- moins d’injection d’ocytocine de synthèse
- moins d’instrumentalisation (forceps, spatules, ventouses)
- moins de césarienne
- et surtout : une meilleure perception de son accouchement
Conjoint.e prêt.e et briefé.e, doula, amie/soeur, sage-femme… ce sont des options à envisager, en amont, afin d’assurer un réel comité de soutien, présent pour vous.
* le mouvement
Suivez le guide (la douleur) et bougez autant que nécessaire ! Le mouvement, la mobilité, le changement de positions favorisent l’adaptation de votre corps aux mouvements du bébé et l’aident à se positionner pour avancer de manière optimale dans votre bassin. Personnellement je vous dirais même de danser mais c’est à vous de voir 😉
* le bain chaud
Je n’oublierai jamais le bonheur vécu pendant l’accouchement de ma 1ère fille au moment où je suis entrée dans ma baignoire…Pur bliss et une 10aine de minutes de calme absolu… Et oui le bain chaud (ou la douche si vous n’avez que ça sous la main) a un effet vraiment relaxant et bénéfique dans la gestion des contractions. Attention néanmoins à ne pas y aller trop tôt dans le travail et bien attendre d’être dans la phase active pour ne pas risquer de ralentir le travail.
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Les autres ressources
Passons désormais aux autres ressources, très intéressantes à explorer et plébiscitées par de nombreux soignants. Malheureusement elles ne font pas encore l’objet d’un consensus scientifique aujourd’hui, notamment par manque d’études plus poussées sur le sujet.
* la respiration
La relaxation par la respiration reste à mes yeux la 1ère ressource indispensable à toute future maman, péri ou non, césa ou non, nullipare ou non. C’est la base de la base.
On oublie le cliché hollywoodien du « petit chien » (hyper ventiler est même fortement déconseillé). L’idée est plutôt de se détendre et de retrouver le calme grâce à des respirations longues et profondes. Il existe de nombreuses méthodes, approches, avec visualisation ou non, avec musique ou sans. Trouvez ce qui vous convient à vous.
Et quand vous aurez trouvé votre « truc » : entraînez-vous ! Encore et encore, tous les jours, jusqu’à ce que cela devienne un automatisme dans votre corps.
* l’acupuncture, l’acupression
L’acupuncture ne peut être pratiquée que par un médecin ou une sage-femme diplômé.e (je vous souhaite vraiment d’avoir cette chance). L’acupression elle peut être pratiquée par le/la partenaire ou toute autre personne présente qui y a été sensibilisée.
* l’hypnose, la méditation
Calme, concentration, visualisation… s’entraîner à retrouver un état de conscience modifié est une habitude de calme et de manifestation qui va bien au-delà de l’accouchement. Ces pauses régulières dans un quotidien souvent surchargé émotionnellement deviennent rapidement indispensables quand on y prend goût. Vous pouvez trouver de nombreuses ressources (en ligne, en présentiel) autour de ces sujets. Testez !
* les massages
Le toucher physique (consenti j’entends) peut être une grande source d’apaisement. Explorez avec votre partenaire pendant la grossesse : quels endroits, quelle pression, quelle intensité… si le massage peut améliorer sa perception d’un corps qui change, il peut également être très utile pour relâcher des tensions et accompagner les contractions. Il n’est d’ailleurs pas impossible que vous ayez follement envie/besoin que votre moitié vous caresse les seins ou toute autre zone érogène pendant le travail…
Et encore une fois, si ce toucher finalement vous insupporte ou vous dérange sur le moment : communiquez-le à la personne qui vous accompagne.
D’autres ressources
- l’électrostimulation (TENS)
- l’aromathérapie
- la musique, le chant
- l’alternance chaud/froid
Et certainement pleins d’autres ressources sont disponibles : essayez !
Conclusion
L’intensité des contractions n’est pas un mal nécessaire et vous pouvez parfaitement accoucher sans souffrir le martyr. Vous préparer reste la meilleure façon d’appréhender un accouchement positif et autonome. Si vous avez un projet d’accouchement physiologique en maternité, il sera beaucoup plus facile pour les soignants de vous soutenir dans ce projet si vous ne dépendez pas intégralement d’eux. Et si vous êtes ici parce que vous avez comme projet d’accoucher chez vous, la préparation est à mes yeux un must absolu.
Développez vos ressources en couple ou binôme et cherchez les outils qui vous conviennent. Vous préparez le plus beau et le plus fou des voyages de votre vie…honorez ce moment !
Love, now & always,
Sophie
Et si vous souhaitez être accompagnée afin d’explorer davantage vos ressources & toutes les facettes d’une maternité consciente et souveraine, je vous invite à me contacter directement par message (rubrique Contact).
*Sources
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24761801/
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15544978/
Rappel : un article nourri votre mental d’infos utiles et constructives pour être « au calme » et pouvoir passer aux étapes d’après. Cela ne remplace pas le cheminement personnel d’intégrer dans le corps et dans le coeur les changements nécessaires à une réelle transformation.
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